La Révolution haïtienne avait été suivie avec beaucoup d’intérêt à Stockholm au cours des premières années du dix-neuvième siècle1. On s’attendrait à ce qu’un pays scandinave, situé à la périphérie de l’Europe, aurait manifesté peu d’intérêt pour les événements survenus alors aux Caraïbes et se serait maintenu distant de ceux-ci. Mais tel n’avait pas été le cas. De 1802 à 1804, un journal de Stockholm avait publié, à 276 reprises, des rapports sur la révolution et mentionné 178 fois le nom de Toussaint Louverture.
L’intérêt suédois pour Haïti ne s’était pas limité à des reportages sur la révolution. La Suède avait essayé, de différentes façons, d’augmenter son commerce avec le nouveau pays, et des marchands, aussi bien suédois que français, avaient commercé officieusement, sous pavillon suédois, avec l’État indépendant d’Haïti. Au cours des années 1810, le gouvernement suédois avait essayé de vendre des armes au nord et au sud d’Haïti, en se servant de Saint-Barthélemy, sa colonie aux Caraïbes, comme avant-poste. Le cas de la Suède constitue une confirmation de plus de la justesse des conclusions des recherches récentes qui rejettent la thèse de l’isolement d’Haïti après l’indépendance2. Le commerce suédois est un exemple clair de la façon dont les petites puissances coloniales ont essayé de se tailler une position avantageuse dans le commerce hautement compétitif existant avec Haïti et avec les États naissants d’Amérique latine, pendant et après les guerres napoléoniennes.
Au cours des années 1810, plusieurs Suédois ont visité Haïti, en tant que personnes engagées par le gouvernement ou en tant que voyageurs. Certains d’entre eux ont écrit des récits détaillés. Un document particulièrement intéressant, celui d’un officier suédois de l’armée de Henry Christophe, offre de nouvelles informations sur les dernières étapes du règne de ce dernier, en 1820.
Montréal: Les Éditions du CIDIHCA , 2023. Vol. 3, p. 605-648